Sans papiers, sans dignité : ces Brésiliens “invisibles” qui n’existent pas

Adriana a 22 ans, mais elle n’est pas encore née. Pas officiellement. La jeune carioca, noire, mince, avec une posture de ballerine et des sourcils bien marqués n’a jamais eu d’acte de naissance. Elle n’avait pas non plus de RG, de permis de travail, de CPF ou tout autre document. « Je n’existe même pas dans le monde », dit-elle, d’une voix basse, presque inaudible. Sans avoir jamais rencontré son géniteur, Adriana a été élevée par Mônica, avec qui son père a commencé à vivre lorsqu’elle avait cinq ans. Après l’abandon de la famille par l’homme, c’est la belle-mère qui a découvert que la petite fille n’avait jamais été enregistrée et a entamé une odyssée qui a duré des années pour obtenir les papiers qui certifient qu’Adriana, vivante et en chair et en os, est une citoyenne brésilienne. « Sa vie est arrêtée, elle ne peut pas suivre de cours, elle ne peut pas avoir de travail officiel, elle ne peut rien faire », dit Mônica, 46 ans, sur un ton de révolte.

Selon les estimations de l’Institut brésilien de géographie et de statistique (IBGE), Adriana fait partie des quelque trois millions de personnes dans le pays qui ne possèdent aucun document d’état civil, tel qu’un certificat de naissance.